les symboles de la République
définitions
- "Allégorie, symbole, emblème, ne sont pas vraiment synonymes.
- Une femme, coiffée d'un bonnet phrygien, et qui foule aux pieds une couronne, forme un tableau relativement complexe, destiné à exprimer l'idée que la République écrase la monarchie : ce discours imagé, substitué au discours abstrait, est typiquement une allégorie.
- Le bonnet phrygien signifie que cette femme est par excellence un champion de la liberté, puisque ce bonnet était à Rome mis sur la tête des esclaves affranchis ; cette liaison n'est pas d'une évidence primaire, elle vient de l'histoire, on la possède par la culture ; on dira donc que le bonnet phrygien est un symbole.
- Si cette femme à bonnet phrygien se réduit à un buste ou même à un profil banal, après un siècle d'accoutumance à ce qui sera devenu une convention, stable et partout reçue, on parlera plutôt d'emblème.
«La femme au bonnet phrygien est l'emblème de la République française» - ainsi s'exprime le Petit Larousse, pour illustrer précisément le mot emblème..."
Maurice Agulhon, Marianne au combat.
L'imagerie et la symbolique républicaines de 1789 à 1880,
Flammarion, 1979, p. 8.
synthèse et repères
- Drapeau tricolore :
- Liberté-égalité-fraternité : devise républicaine issue de la Révolution française - décret n° 88 du 25 septembre 1870, qui reprend mot pour mot la décision de 1848, à propos du sceau de l'État républicain : faire figurer sur une face la devise Liberté, Égalité, Fraternité.
- Victor Hugo défend les idées de progrès incarnées par la Révolution contre les empereurs d'Autriche, de Prusse et de Russie :
«À trois empereurs, opposons trois dates : le 14 juillet, le 10 août, le 21 septembre. Le 14 juillet a démoli la Bastille, et signifie Liberté ; le 10 août a découronné les Tuileries et signifie Égalité ; le 21 septembre a proclamé la République et signifie Fraternité». (cité dans Choses vues, Quarto-Gallimard, 2003, p. 1021).
- La Marseillaise : redevient hymne national par un décret du ministre de la Guerre, le 14 février 1879 (suivant le décret du 26 messidor an III).
- Le 14-juillet : devient fête nationale, le 14 juillet 1880.
- Marianne : représentation en femme de la République (buste de femme coiffée du bonnet phrygien), dans les années 1880.
* monument à la République : Paris en 1883
** dès 1879, la victoire politique est consommée avec le remplacement à l'Élysée de Mac-Mahon par Jules Grévy et la mise en place de toute une symbolique de cette République triomphante : La Marseillaise promue hymne national et, l'année suivante, le 14-juillet proclamé fête nationale. (Sirinelli)
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arrière du palais présidentiel de l'Élysée, Paris : grille du Coq avec le monogramme RF
La République française et ses symboles
Maurice AGULHON
La vieille nation appelée France est aujourd’hui officiellement désignée par le terme "République française". De là l’usage assez fréquent du monogramme RF, employé comme une sorte de logo.
Le régime républicain fait aujourd’hui à peu près l’unanimité dans l’opinion, mais il n’en a pas toujours été ainsi. Au XIXe siècle, dans le sillage de la Révolution française, les symboles de la République dont on va trouver ici l’énumération et le bref commentaire ont été ceux de la France révolutionnaire puis libérale (ou, si l’on veut, de la France de gauche) contre la France monarchique et conservatrice. C’est au XXe siècle qu’ils sont devenus ceux de la République française acceptée, consensuelle, et, en somme, ceux de la France tout court.
Un seul symbole visuel est officiellement consacré par son inscription dans la Constitution, c’est le drapeau tricolore, bleu, blanc, rouge, dans cet ordre, à partir de la hampe. Inventé en 1789, lié à la France révolutionnaire puis impériale, il a été violemment rejeté et remplacé par un drapeau blanc de 1814 à 1830. C’est la révolution de 1830, dite de Juillet, qui l’a définitivement ramené et reconsacré. La droite royaliste et catholique intransigeante a peu à peu transféré sa dévotion du drapeau blanc aux trois couleurs. Cependant que l’extrême gauche révolutionnaire qui, vers la fin du XIXe siècle, vouait un culte subversif au drapeau rouge s’est à son tour ralliée au tricolore (période du Front populaire puis de la Deuxième Guerre mondiale).
Aujourd’hui le drapeau tricolore est unanimement reconnu comme signe de la France. Il existe une certaine tendance à le relativiser en portant quasiment à son niveau les drapeaux d’autres ensembles territoriaux. Il n’est plus rare de voir au fronton d’une mairie un même écusson supporter trois drapeaux, le tricolore au centre, le drapeau (officieux) de la région d’un côté, et le bleu étoilé de l’Europe de l’autre.
La même dialectique se reconnaît dans un autre symbole national officiel, La Marseillaise. Créé en 1792, l’hymne a été pendant près d’un siècle perçu comme révolutionnaire, donc partisan.
C’est la Troisième République qui en a fait, en 1880, l’hymne national légalement consacré. Puis l’opposition de droite s’y est ralliée en même temps qu’elle acceptait le drapeau tricolore et qu’elle s’investissait dans le nationalisme. Quant à l’opposition d’extrême gauche, elle l’accepta à son tour à la grande époque de l’antifascisme et de la Deuxième Guerre mondiale.
Aujourd’hui La Marseillaise reste officielle au niveau des célébrations nationales et militaires mais sa popularité "n’est plus ce qu’elle était", victime du pacifisme diffus et de l’antinationalisme implicite d’une société qui cherche à tâtons d’autres repères. Ici s’arrête d’ailleurs le parallélisme avec l’histoire du drapeau : si en effet, on l’a dit, le drapeau européen est connu et déjà popularisé, il n’a pas d’équivalent en musique, du moins au même niveau de notoriété.
La représentation de la République française par une figure allégorique, celle d’une femme, généralement coiffée d’un bonnet phrygien, n’est pas inscrite dans la Constitution, mais on ne peut lui dénier un caractère officiel puisqu’elle figure sur le sceau de l’État, ainsi que sur les pièces de monnaie et les timbres-poste, autres signes d’activité et de responsabilité publiques.
Là encore, tout remonte à la Révolution qui, en rejetant la Monarchie, ses armoiries, ses emblèmes à fleurs de lys, ne pouvait se dispenser de les remplacer. Le sceau de l’État – décréta la Convention à la fin de septembre 1792 – porterait une "figure de la Liberté".
Or les traités d’iconologie classiques depuis plusieurs siècles faisaient du bonnet phrygien l’attribut caractéristique de la Liberté. Par la décision de 1792, cette coiffure devenait donc l’emblème principal de la République française, et entrait dans l’histoire de France pour ne plus en sortir.
Dès lors que la République a vaincu et a tendu à s’identifier à la France, l’allégorie de la France porte bonnet phrygien, et le bonnet se trouve en quelque sorte francisé. Cette nationalisation française du bonnet phrygien était assez évidente dès la fin du XIXe siècle pour que la Liberté universelle doive se trouver d’autres coiffures (la plus célèbre étant celle de la statue de La Liberté du sculpteur Bartholdi, à New York).
Cependant, au cours de l’histoire compliquée du XIXe siècle, il s’était trouvé des républicains pour considérer que le bonnet phrygien était trop révolutionnaire, et qu’une République légaliste et pacifique devait être représentée coiffée d’autre façon (lauriers, par exemple). C’est à cette parenthèse vite refermée de notre histoire que la symbolique républicaine doit pourtant quelques créations encore notoires, voire visibles aujourd’hui : le premier timbre-poste français, dit à la Cérès, de 1849, ou la République assise et couronnée de soleil sur le sceau de l’État et les panonceaux des notaires, ou encore la tête qui figure sur la médaille de la Légion d’honneur.
Avec ou sans bonnet, mais le plus souvent avec, les types de République française allégorique rendus officiels par les monnaies et les timbres se sont succédé en grand nombre. La plus célèbre, du fait de son originalité (figure en pied sur un petit format), du fait de sa surcharge symbolique et – tout simplement – de son charme est la Semeuse (création d’O. Roty en 1897).
La représentation en femme de la République révolutionnaire, puis de la sage "République française", puis de la France a connu bien d’autres emplois et bien d’autres supports que les signes d’État que l’on vient de présenter : statues de places publiques, bustes pour orner l’intérieur d’édifices divers, œuvres libres de peintres, sculpteurs ou graveurs, allégories vivantes sur la scène ou dans la rue, bibelots pour collections et domiciles privés, enfin et surtout caricatures de presse. Tout cela libre, officieux… ou contestataire.
Même liberté, hors de toute prescription légale, dans l’emploi, attesté depuis 1792, du surnom de "Marianne" pour la désigner. De nos jours, il semble que l’usage du buste de la République en femme à bonnet phrygien, avec le nom de "Marianne", se spécialise dans l’institution municipale (plutôt que dans la politique d’État) et se prête, parfois, à des jeux folkloriques et médiatiques assez éloignés de la gravité républicaine officielle.
Plus récemment cependant, une Marianne sereine s’est officiellement mariée aux trois couleurs du drapeau français pour devenir la marque identifiant visuellement la Fonction publique d’État. Créée en 1999, elle est désormais présente sur les papiers à lettre, brochures, formulaires, affiches et supports d’information émanant des ministères, préfectures ou ambassades.
La même ambiguïté concernait depuis longtemps le Coq. Le Coq, symbole chrétien de la vigilance depuis le récit de la Passion, était depuis longtemps francisé dans la culture nationale par la proximité latine du Coq et du Gaulois (Gallus gallicus). Sans oublier sa flatteuse réputation de combativité et de vaillance : vertus du Coq, vertus réputées bien françaises. Malgré cela, l’érection du Coq en symbole national officiel n’a jamais dépassé le stade des velléités, malgré des tentatives aux temps de la Révolution, de la monarchie de Juillet et de la Troisième République.
Il semble que le Coq ait été refusé pour deux raisons : l’une étant que le choix d’un animal symbole aurait en soi quelque chose de héraldique, donc de "féodal", donc de mauvais ; l’autre est que, de toute façon, le Coq, animal de basse-cour, ne pourrait être mis avec vraisemblance au niveau des lions et des aigles. Le Coq a donc été réduit à deux emplois, non négligeables mais néanmoins en retrait par rapport à la dignité politique de l’État : la symbolisation de notre excellence sportive, et – parfois – celle de la vaillance militaire dans quelques monuments aux morts de la Grande Guerre.
La Deuxième Guerre mondiale a été faite et gagnée (du moins en ce qui concerne la contribution française) sous le signe de la Croix de Lorraine, emblème choisi par la France libre puis par la Résistance pour distinguer leur drapeau du tricolore gardé par Vichy. La Croix de Lorraine est donc utilisée couramment pour marquer les monuments évocateurs de l’époque 1940-1945, depuis le mont Valérien jusqu’aux plus humbles et plus rustiques lieux de combats de maquis.
Mais la Cinquième République a fait plus encore pour elle en exaltant la magistrature présidentielle et en lui donnant pour premier titulaire en 1958-59 le général de Gaulle. Celui-ci fut le premier à remplacer, sur la médaille commémorative de son accession à l’Élysée, l’image de la République en femme par celle de la Croix de Lorraine encadrée du V. L’innovation était même double : promotion de sens pour la Croix de Lorraine, et obligation faite aux successeurs du Général de se choisir à leur tour des sortes d’armoiries personnelles.
Y a-t-il enfin des symboles en forme de monuments ? La Troisième République a renoncé en 1882 à faire reconstruire les Tuileries incendiées en 1871, elle a continué à faire siéger les pouvoirs publics dans les palais hérités de siècles anciens (Luxembourg, palais Bourbon, Élysée, etc.). Paris n’offre donc rien qui soit comparable au gigantesque Capitole de Washington DC, siège d’assemblées, musée et marque symbolique républicaine tout à la fois. Ce qui se rapproche le plus d’un symbole monumental de la République à Paris est donc le Panthéon, bâti sous Louis XV comme église Sainte-Geneviève, et laïcisé nationalisé en 1791 comme sépulture des "Grands Hommes".
Au XIXe siècle, le Panthéon a véritablement polarisé l’hostilité que les forces de droite vouaient à la République : on le rendit à l’Église de 1814 à 1830, puis de 1851 à 1885, ou bien on le méprisa, tant il contenait de célébrités sulfureuses (Voltaire et Rousseau, Victor Hugo et Émile Zola, Marcelin Berthelot et Jean Jaurès, etc.). On exagérerait à peine en disant qu’au milieu du XXe siècle encore le Panthéon n’était un panthéon que pour la Gauche, et que la Droite avait son véritable panthéon aux Invalides (Turenne et Vauban, Napoléon et le maréchal Foch, etc.).
La France de Droite devait pourtant finir par se rallier au respect du Panthéon comme elle en était venue à accepter la République elle-même. Décisive sans doute l’année 1964 où le général de Gaulle, en faisant panthéoniser Jean Moulin, acceptait ipso facto de reconnaître le grand temple du Quartier latin comme national aux yeux des deux camps, donc, en principe, aussi unificateur de la France politique que l’étaient devenus en leur temps la République, son drapeau et son bonnet phrygien.
Maurice Agulhon, professeur honoraire
de la chaire d’histoire contemporaine au Collège de France,
membre du Haut Comité des célébrations nationales,
est auteur de nombreux ouvrages sur la France des XIXe et XXe siècles.
Bibliographie
Agulhon (Maurice), Marianne au combat, l’imagerie et la symbolique républicaines de 1789 à 1880, Flammarion, 1979.
Agulhon (Maurice), Marianne au pouvoir, l’imagerie et la symbolique républicaines de 1880 à 1914, Flammarion, 1989.
Agulhon (Maurice), Métamorphoses de Marianne, l’imagerie et la symbolique républicaines de 1914 à nos jours, Flammarion, 2001.
Agulhon (Maurice), et Bonte (Pierre), Marianne dans la cité, (cet album de photographies est complémentaire de l’ouvrage précédent), Dexia et Imprimerie nationale, 2001.
Agulhon (Maurice) et Bonte (Pierre), Marianne, visages de la République, Gallimard Découvertes,1992.
Nora (Pierre), Les lieux de mémoire, tome 1, La République, Gallimard, 1984.
Pastoureau (Michel), Les emblèmes de la France, Bonneton, 1998.
source désactivée
- sur ce blog : Maurice Agulhon, Marianne au combat, 1789-1880, compte rendu par Alain Corbin (1979).
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allégorie de la République, 1848
source
le symbolisme dans les images de Marianne
Le bonnet phrygien la liberté, l'affranchissement
La couronne le pouvoir
Le sein nu la nourrice et l'émancipation
La cuirasse l'invincibilité
Le rameau d'olivier la paix
Le lion le courage et la force du peuple
L'étoile la lumière
Le triangle l'égalité
Les chaines brisées la liberté conquise
Les mains croisées la fraternité
Les faisceaux l'autorité de l'État
La balance la justice
La ruche le travail
Les tables de la loi la loi
une synthèse sur le symbolisme dans l'image de Marianne
Marianne et la devise de la République
Marianne représente la permanence des valeurs qui fondent l'attachement des citoyens à la République : "Liberté, Égalité, Fraternité".
Parfois employé par les opposants au régime républicain, mais surtout par ses défenseurs, le prénom de Marianne (Marie-Anne), populaire, est le symbole d'une République qui s'est construite par l'adhésion progressive de tous les citoyens à cette devise. Marianne est devenue peu à peu la représentation la plus facile à partager de la "mère-patrie", tantôt fougueuse et guerrière, tantôt pacifique et nourricière.
L'image de La Marianne trouve son origine dans l'Antiquité. Le bonnet phrygien est porté par les affranchis de l'Empire romain, esclaves auxquels leur maître a rendu la liberté et dont les descendants sont considérés de ce fait comme citoyens de l'Empire. La Démocratie est déjà représentée sous des traits féminins ; à ses pieds un gouvernail et un sac de blé à moitié renversé ; peu soucieuse de puissance, elle se préoccupe en effet surtout des aspirations du peuple.
À partir de 1789, des sculptures, des tableaux, représentent des personnages féminins portant les valeurs de la Révolution française au premier rang desquelles est placée la Liberté. La Liberté apparaît sous les traits d'une jeune femme, portant une robe courte et tenant dans sa main droite une pique ornée du bonnet phrygien. C'est une guerrière symbolisant l'idée que la liberté s'acquiert par les armes. Parfois, cette figure de la Liberté paraît plus sage, plus grave, drapée d'une longue robe tunique, dans une posture plus sereine. Elle perd alors nombre de ses attributs dont le bonnet phrygien, porté par les révolutionnaires.
L'Égalité prend aussi la forme d'une jeune femme suivie par des enfants portant les symboles des trois ordres de l'Ancien régime : les outils agricoles du Tiers-État, la Bible du Clergé et la couronne de la Noblesse, synthèse de l'ancienne et de la nouvelle France. À l'origine, L'Égalité tient dans ses mains une balance en équilibre, celle du Jugement dernier, mais les artistes révolutionnaires lui préfèrent le niveau, symbole d'égalité plus que d'équité. La Fraternité tient un bâton surmonté du coq gaulois et derrière elle, deux enfants mènent attelés ensemble un lion et un mouton. Marianne est souvent armée et casquée, comme l'Athéna grecque. La République est guerrière et protectrice, elle combat pour défendre ses valeurs, au premier rang desquelles la Liberté, comme à Valmy où, face à la réaction monarchiste, elle affirme sa vocation universelle.
Un décret de 1792 dispose que "le sceau de l'État serait changé et porterait pour type la France sous les traits d'une femme vêtue à l'antique, debout, tenant de la main droite une pique surmontée du bonnet phrygien, ou bonnet de la Liberté, la gauche appuyée sur un faisceau d'armes ; à ses pieds un gouvernail". Marianne a retrouvé des attributs anciens, notamment le lion et le Trône, mais elle tient dans ses mains, outre l'épée ou le faisceau d'armes, le drapeau tricolore français. À ses pieds, on trouve la loi et la Déclaration des Droits de l'Homme et du Citoyen présentée au monde. À la même époque, ses ennemis caricaturent la République en lui donnant le nom populaire de Marie-Anne car si la République veut s'occuper du peuple, disent-ils, elle doit en porter le nom.
Après 1799, la fin de la République et l'établissement du régime de l'Empire affaiblissent la représentativité de Marianne, même si le thème de la Liberté reste vivace. Nombre d'artistes la perpétuent, parmi lesquels notamment Eugène Delacroix dans La liberté guidant le peuple aux barricades de 1830. Le nom de Marianne réapparaît un temps avec la seconde République mais prend souvent un sens péjoratif. Les partisans de la République sociale reprennent le prénom. Dans le même temps, un concours est organisé en 1848 pour définir la représentation de la nouvelle République où réapparaîtraient les valeurs révolutionnaires. En proclamant le régime de l'Empire en 1852, Napoléon III fait remplacer sur les pièces de monnaie et sur les timbres-poste la figure de Marianne par sa propre effigie. Parallèlement, des groupes d'opposition républicains se constituent, et prennent Marianne comme figure de ralliement.
Dès le retour de la République, la Commune parisienne développe le culte de la combattante révolutionnaire au buste dénudé qui porte le bonnet phrygien rouge des sans-culotte. Mais à Paris celle-ci n'est jamais appelée Marianne et le nom n'est utilisé que dans les provinces. Dans chaque ville, des statues, des cloches portent ce prénom et rappellent les grandes heures révolutionnaires : 1789, 1830, 1848.
En 1871, après la Commune, les fondateurs de la IIIe République veulent restaurer la symbolique républicaine sans pour autant encourager des mouvements révolutionnaires. Ils préfèrent donc au bonnet phrygien la couronne d'épis de blés, inspirée de la couronne de soleil qui ornait les pièces de 1848. Mais le modèle est diversement suivi et dans toute la France s'oppose statue à épis et statue à bonnet phrygien. Quant au nom qu'il faut lui donner, tout dépend de la classe sociale : le républicain du peuple la nomme "Marianne", le républicain bourgeois parle de "la République" et l'antirépublicain, s'il ne l'injurie pas par un "la gueuse", emploie "Marie-Anne" de façon péjorative. Peu à peu les bustes se multiplient dans les mairies, les écoles. La mairie de Paris commande un modèle portant le bonnet phrygien en 1880. Le modèle se fige peu à peu : c'est un buste de femme au visage calme et jeune portant parfois la couronne d'épis, plus souvent le bonnet phrygien. La République s'installe.
Au vingtième siècle, toutes les mairies se dotent progressivement d'un buste de Marianne qui porte désormais systématiquement le bonnet phrygien et apparaît débarrassée de ses autres attributs (faisceau d'armes, niveau ou balance). Marianne est représentée de manière très épurée. Les dernières représentations, les plus en vogue dans les mairies aujourd'hui, sont celles reprenant les traits de Brigitte Bardot et de Catherine Deneuve. En marge des représentations officielles, des représentations libres se multiplient ; les caricaturistes s'emparent de Marianne comme image symbolisant la nation. L'assimilation de la République française à "La Marianne" est maintenant acquise. Marianne a survécu aux cinq Républiques et aux vicissitudes de l'histoire en renforçant son pouvoir symbolique à mesure que s'affirmait l'idée de la nation française.
http://www.insecula.com/article/F0010611.html
liens
- Les bustes de Marianne, Assemblée Nationale
- Marianne : la République est une femme [lien actuellement périmé - mars 2016]
- Symbolisme et visages de Marianne sur les timbres-poste
- D'où vient le bonnet de Marianne ?
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analyse d'image
1) La République, de Antoine-Jean Gros, 1794
identifier les signes qui caractérisent cette allégorie de la République
identification des symboles de La République, tableau d'Antoine-Jean Gros, 1794 (version 2016)
symboles figurant sur le tableau La République d'Antoine-Jean Gros (1794)
- bonnet phrygien : la liberté arrachée à l'esclavage ou à la servitude
- pique, pointe renversée : vertu guerrière mais non agressive
- tunique courte à l'antique, toge et sandales légères : allusion à Athènes et à Rome dont les citoyens défendent leur liberté
- casque de Minerve ou d'Athéna : attribut de la déesse de l'intelligence au combat (stratégie)
- niveau : notion d'égalité
- feuilles de chêne : puissance, solidité, longévité, majesté
- faisceau de licteur : l'autorité du licteur qui exécute les sentences des magistrats romains
* horizon informe : le paysage est négligeable dans ce tableau, seule compte l'allégorie puissante.
2) xxx
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