les 4 professeurs de l'École pratique de Saint-Chamond, morts pour la France
Marius BADARD, Joseph BRACCIANO,
Julien CARUELLE, Constant GARNIER
les 4 professeurs de l'École pratique de Saint-Chamond,
morts pour la France
Une photo d'un groupe de professeurs à l'École Pratique et d'Industrie de Saint-Chamond (sans date et sans identification personnelle), avant 1914 :
archives municipales de Saint-Chamond
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Marius BADARD
Marius Badard était âgé de 35 ans lors du déclenchement de la Première Guerre mondiale. Il est mort à 36 ans de pneumonie et complications cardiaques, à l'hôpital temporaire n° 9 à Amiens dans la Somme.
Ses connaissances techniques et ses compétences lui avaient valu d'être nommé maréchal des logis, autrement dit "sergent". Il était donc sous-officier.
Son régiment, le 6e d'Artillerie a combattu dans les Vosges à l'été 1914, puis participé à la défense d'Arras (Pas-de-Calais) en octobre de la même année. Début 1915, il est stationné dans la boue des tranchées de l'Artois. Est-ce là que Marius Badard a contracté sa pneumonie ? Possible.
l'artillerie autour d'Arras en 1914
Aucune image ne présente avec certitude les lieux et activités auxquels Marius Badard a pu être réellement associé. Mais ces photos fournissent un indice de probabilité permettant d'imaginer l'univers qu'il a côtoyé au combat dans la défense d'Arras à l'automne 1914.
batterie d'artillerie française (canons de 75 mm) en action sur le front aux environs d'Arras en 1914
convoi d'artillerie près d'Arras en 1914
abris construits par les artilleurs près du front d'Arras en 1914
messe militaire dans un parc d'artillerie, région d'Arras, 1914
Arras bombardée par les Allemands en 1914
bombardement du 6 octobre 1914 à Arras, rue Gambetta prolongée
le beffroi d'Arras après le premier bombardement de 1914
l'Hôtel-de-Ville après le bombardement du 21 octobre 1914
ruines de l'Hôtel-de-Ville d'Arras, fin 1914 - début 1915
l'hôpital temporaire n° 9 à Amiens
Marius Badard est décédé le 25 avril 1915 dans un hôpital temporaire installé dans la ville d'Amiens. Il y en avait plusieurs. Le n° 9 était abrité dans le Collège de la Providence, situé rue Émile Zola.
pharmaciens de l'Hôpital temporaire n° 9 à Amiens
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Joseph BRACCIANO
Ce nom pose un problème. Il ne figure pas sur la liste des "morts pour la France" dans la base de données éditée par le site Mémoire des hommes.
On ne trouve sur cette base qu'une seule référence pour ce patronyme. Il s'agit de Joachim Émile Bracciano né en Martinique en 1889 et mort le 24 septembre 1916 dans la Somme. L'autorité enregistrant ce décès est le Tribunal de Fort-de-France dont le jugement est envoyé à Trois Ilets en Martinique. Peut-il correspondre au professeur Joseph Bracciano ?
Non. En réalité, il s'agit probablement d'une erreur commise lors de la recension des noms à graver sur la plaque en 1920-1921.
Le seul Bracciano identifiable comme ayant été professeur à l'École Pratique de Saint-Chamond s'appelle Louis Bracciano.
Son nom apparaît - mais sans prénom - dans l'Annuaire administratif et statistique du département de la Loire, 1900 (en ligne sur Gallica BnF). Il est mentionné comme professeur à l'École Pratique de Saint-Étienne et de Saint-Chamond au titre de contremaître de modelage et de sculpture. Il ne peut donc y avoir de confusion avec un Joachim Bracciano né à la Martinique en 1899.
Voici ces documents dans lesquels figure le nom de Bracciano :
Annuaire administratif et statistique du département de la Loire, 1900
Annuaire administratif et statistique du département de la Loire, 1900
Par ailleurs, Michèle Bracciano, petite-fille de Louis, a porté à notre connaissance le prénom de son grand-père, ses dates de naissance et de décès (1844-1926) et des informations familiales sur les enfants de Louis.
Croisant celles-ci avec l'adresse de Louis Bracciano à Saint-Étienne au 5, rue Denis-Papin (voir photos ci-dessous), nous avons trouvé les données de la famille Bracciano dans le recensement de 1911 :
recensement de la famille Bracciano, au 5, rue Denis Papin à Saint-Étienne, en 1911
(arch. municipales de Saint-Étienne)
la famille Bracciano et la guerre
Louis Bracciano n'a pas fait la guerre. De son épouse, Alexandrine Caristia, il eut plusieurs enfants dont cinq furent mobilisés :
- Charles, né en 1878, sculpteur, ne semble pas avoir combattu ; une commission de réforme du 9 juin 1915 ayant pris en compte la pathologie (endocardite) qui l'emporta peu après, le 28 février 1916 à Saint-Étienne.
- Eugène, né en 1884, sculpteur, est passé par le 38e régiment d'Infanterie et par le 14e régiment de Dragons entre 1914 et 1915 sans que l'on sache précisément quelles furent ses activités ; il fut réformé en août 1916 pour "mélancolie anxieuse" après un séjour à l'asile de Saint-Dizier ; on évoca ensuite une "démence précoce à forme paranoïde" (janvier 1926).
- Félix, né en 1887, menuisier ; engagé volontaire pour trois ans, le 5 octobre 1906, au 96e puis au 17e régiment d'Infanterie ; nomme sergent le 3 juillet 1908 ; affecté à plusieurs régiments divers de 1914 à 1919 ; il a habité rue Daguerre à Saint-Étienne, puis a déménagé à Saint-Dizier en 1925, pour revenir à Saint-Étienne, rue Désirée-Claude en décembre 1927.
- Adrien, né en 1890, dessinateur industriel ; deux ans de service militaire de 1911 à 1913 ; semble avoir passé la guerre dans plusieurs régiments sans que, comme son aîné Eugène, l'on sache les tâches qu'il y accomplit ; on le suit, sur sa fiche matricule, jusqu'en 1939.
- Jean, né en 1894, employé de commerce ; a passé les quatre années de guerre dans différents régiments d'artillerie lourde, nommé brigadier en juillet 1916 ; on suit sa trace jusqu'en 1929.
Ainsi, aucun Bracciano n'est "mort pour la France". Aucun ne s'appelait (prénoms ou surnom) Joseph. Il semble assez peu probable qu'un autre Bracciano ait été "maître" à l'École Pratique juste avant guerre et qu'il soit mort au cours de celle-ci sans qu'on n'en retrouve le moindre souvenir...
Concluons donc, provisoirement, qu'il sagit d'une erreur. Cependant, étant donné que la recension des noms fut effectuée par l'Amicale des Anciens élèves et par la direction de l'école, l'inexactitude reste, pour une part, une éventualité inexplicable.
la maison du sculpteur Louis Bracciano à Saint-Étienne
5, rue Denis Papin à Saint-Étienne (Street View)
5, rue Denis Papin à Saint-Étienne (Street View)
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Julien CARUELLE
Julien Paul Caruelle est né le 6 mars 1885 à Bailleul-sur-Thirain (aujourd'hui, Bailleur-sur-Thérain) dans le département de l'Oise. Est-ce bien lui qui fut professeur à l'École Pratique de Saint-Chamond ?
Cette fiche homonyme, d'un soldat "mort pour la France", est peut-être la sienne.
D'abord parce qu'elle porte les mêmes nom et prénom, et qu'elle est la seule parmi les treize fiches disponibles sur Mémoire des hommes. Ensuite, parce qu'elle nous permet d'accéder à sa fiche matricule conservée aux archives départementales de l'Oise.
Celle-ci nous fournit deux indices qui étayent la possibilité que ce Julien Caruelle soit le professeur de l'École Pratique d'Industrie de Saint-Chamond :
- au moment de son recensement, il exerçait la profession d'instituteur public ;
- il a travaillé à l'École professionnelle de Reims (Marne), qui était également son domicile à la date du 2 octobre 1907 : 55, rue Libergier.
fiche matricule de Julien Caruelle (1885-1914)
l'école professionnelle de Reims dans laquelle Julien Caruelle a exercé sa profession
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Constant GARNIER
Constant Garnier est né en 1883 à Bévenais, dans l'Isère. Son père s'appelait Jean-Pierre et sa mère, Marie-Madeleine Truffier-Blanc.
le village de Bévenais, où est né Constant Garnier le 7 janvier 1883
la famille de Constant Garnier
En 1896 (peut-être dès avant...), Jean-Pierre Garnier (1851-1910) était instituteur et directeur d'école à Châbons, petite commune de l'Isère. Il habitait au numéro 18 du hameau de l'Église, avec son épouse (38 ans) et leurs quatre enfants : Félix (19 ans), instituteur-adjoint, Constant (13 ans), Gabriel (11 ans) et Rosine (2 ans).
l'école dont le père de Constant Garnier était directeur, à Châbons (Isère)
Châbons, village où a grandi Constant Garnier (carte postale ancienne, colorisée)
la gare de Châbons d'où est parti Constant Garnier pour l'École nationale de Voiron en 1905
Constant Garnier avait les cheveux et les sourcils châtains clairs, les yeux bleus, le menton rond et le visage ovale. Il mesurait 1m64. Lors de son recensement en 1903, il exerçait, comme son père et comme son grand-frère, la profession d'instituteur.
Les adresses mentionnées sur sa fiche matricule permettent de reconstituer son itinéraire professionnel. En octobre 1905, il est admis à l'École nationale de Voiron et y reste jusqu'à la fin de l'année scolaire 1909.
En octobre 1909, il est nommé à l'École pratique d'industrie de Mazamet dans le Tarn et y exerce deux années durant. En décembre 1911, son adresse mentionne la commune de Voiron, au 19 avenue de la Gare.
Le 28 mars 1914, Constant Garnier habite à Saint-Chamond, au numéro 5 de la rue Sadi-Carnot. L'immeuble qu'il occupa est toujours visible aujourd'hui.
l'École nationale (professionnelle) que fréquenta Constant Garnier de 1905 à 1909
Constant Garnier fut nommé à l'École pratique de Mazamet (Tarn) à la rentrée 1909
cette carte postale ancienne a circulé en 1909
Constant Garnier était professeur à Mazamet à l'époque de cette exposition (juin 1910) ;
il a certainement dû s'y rendre
l'avenue de la Gare à Voiron, ville où Constant Garnier résida à partir de 1911
la même avenue aujourd'hui (rebaptisée Léon et Joanny Tardy après 1945)
l'avenue de la Gare à Voiron, telle que Constant Garnier a dû la connaître en 1911
l'immeuble du numéro 19 de l'avenue Tardy aujourd'hui, ancienne av. de la Gare,
où Constant Garnier habita en 1911 ; le bâtiment est le même
5, rue Sadi-Carnot, à Saint-Chamond, adresse de Constant Garnier en mars 1914